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02/11/2019
Je ne suis pas un grand aficionado de Ken Loach et son dernier film, Palme d'or à Cannes ("I, Daniel Black") a terminé loin dans mon classement de l'année 2016. J'étais circonspect au moment de découvrir ce nouvel opus, lui aussi passé par Cannes, mais reparti bredouille malgré les échos positifs au moment de prédire les candidats aux récompenses finales.

Le film raconte la vie d'un père de famille qui décide de changer d'orientation professionnelle. La première scène permet de mettre les choses au clair : le gars a exercé plusieurs métiers mais les a abandonnés car ils étaient trop contraignants (on se caille les miches sur les chantiers en hiver + j'aime être paysagiste mais avec des collègues qui n'en foute pas une, ce n'est pas cool).

Existerait-il un métier parfait ? Celui où l'on gagne beaucoup sans trop travailler, celui où l'on n'a pas de patron mais où l'on ne doit pas soi-même assumer la charge de patron ? Visiblement, la perle rare existerait avec l'idée de trimer pendant 18 mois avant de devenir soit même patron en franchisant son activité. Mais en fait, c'est quoi ce métier ? Livreur pour UPS ou une boîte qui y ressemble...

Ken Loach s'est a priori bien documenté et son film sera à montrer à tous ceux qui souhaitent exercer ce métier. Discuter un peu avec des chauffeurs Uber ou des livreurs de Deliveroo donnerait le même résultat mais ils n'ont pas les mêmes contraintes puisqu'ils sont payés à la tache et font des aller-retour. Là, le camion est chargé en début de journée et ensuite, roule ma poule !

La vie de livreur n'est pas facile et Loach le montre à travers de nombreux détails mais, comme le film n'est pas un documentaire et que Loach a sa petite idée, il va charger la barque avec une histoire familiale lourde qui fait perdre au film son intérêt.
La famille a deux enfants aux extrémités de l'adolescence, une maman aide-soignante à domicile et un papa qui n'aime pas sa situation actuelle et va foncer tête baisser, laissant de coté les avertissements de sa femme, dans une attitude bien égoïste qui le mènera dans un mur bien trop solide pour lui.

Évidemment la cellule familiale va prendre cher mais, si pour moi la responsabilité est partagée entre le père et le méchant monde du travail (quoique, je la diviserai au détriment du père), dans le film Loach veut absolument prouver que le travail est seul responsable de tous les malheurs de cette famille.

On parle de l'éducation des enfants AVANT la prise de fonction du père ? Je veux bien que les horaires de folie n'aident pas aux bonnes relations familiales mais il y a clairement un passif que Loach évoque par petite touche avant de revenir encore et toujours au boulot du père pour montrer que c'est lui qui l'empêche de faire telle ou telle action, que c'est lui qui l'aliène par des règles toujours plus improbables qui oblige l'homme à faire des choix impossibles.

Dès le départ l'histoire est toute tracée et le scénariste coche les cases les unes après les autres, semblant presque prendre plaisir à voir toutes les composantes de la famille exploser les unes après les autres. Un peu d'introspection n'aurait pas fait de mal et aurait évité d'être constamment dans cette sorte d'affect qui me laisse froid. D'ailleurs, sur un sujet similaire, je vous conseille de voir "ceux qui travaillent" sortis le mois dernier : Olivier Gourmet fait face aussi aux problématiques de travail qui déteignent fortement sur la vie familiale et c'est un vrai coup de cœur.

En attendant, si je reconnais à Loach sa peinture réaliste du milieu des chauffeurs livreurs, j'aurais préféré qu'il fasse un vrai documentaire ou qu'il mette un peu plus l'humain fasse à ses responsabilités pour faire avancer le propos du film. Ce n'est pas le cas ce qui donne un film boiteux un peu trop tire larme pour moi. Damned, encore raté (mais moins que d'habitude !).
.O.